Origine du rituel
En Algérie, la circoncision est appelée « T’hara « ou « khtana », ce qui signifie « purifier » ou encore « sceller ». Ce rituel musulman semble tirer ses origines de la tradition hébraïque juive. Il est dit que le prophète Ibrahim pratiqua la circoncision sur lui-même ainsi que sur ses fils comme signe d’allégeance à Dieu. Pour reprendre les dires du docteur Chorfi Mohamed Séghir, cette pratique s’accomplie dans le but d’honorer la triade religieuse suivante : « L’appartenance à l’Islam, le changement de statut, le respect de la tradition. Ce dernier rend compte de l’aspect psychanalytique de la circoncision, dans une enquête dédiée à la région des Aurès qui présente des traits communs à l’ensemble des régions en Algérie, et possède aussi des particularités telle que l’exclusion du père, qui n’assistera pas à l’action de l’ablation du prépuce, pour éviter le sentiment de honte à son enfant devenu « erguez ».
La cérémonie de la T’hara et sa symbolique en Algérie
Les préparatifs commencent dés lors qu’on décide de la date de la circoncision; celle-ci est le plus souvent fixée le vingt -septième jour du ramadan (Leylet el Qadr), ou encore à l’occasion d’un jour pair de la semaine : soit, le lundi ou le mercredi. Parentes, sœurs et voisines se rassemblent pour rouler le couscous, mets de fête de prédilection en Nord Afrique. La joie est portée par des youyous qui préludent le grand jour.
Le jour J, l’enfant est paré de ses plus beaux habits, son trousseau comporte : un saroual loubia, un gilet brodé, un burnous et une chachia. « El tahfifa », qui signifie coupe de cheveux, annonce le début de la cérémonie, et le coiffeur entreprend de couper une mèche symbolique.
Il est à noter qu’autrefois, le barbier et le coiffeur pratiquaient des actes médico-chirurgicaux. A cet effet, ils étaient en charge de la circoncision; de nos jours, les parents optent pour un personnel médical.
Par ailleurs, les femmes sont exclues de la cérémonie qui se déroule en huis clos. Les membres masculins proches sont admis à savoir l’oncle, le père (sauf pour certaines régions) et le grand-père. Une fois l’ablation du prépuce achevée, les youyous et le son du bendir retentissent. L’enfant est pris en charge par sa mère et ses grands-mères pour le rituel de la «henna ». A Tlemcen, l’orchestre féminin des « f’qirat » anime la fête. Les invités sont honorés avec des dattes, des friandises, du messfouf (couscous au miel) et rfis, une galette sucrée préparée avec du beurre et du miel.
Les rites d’initiations et de passages à l’âge adulte sont des marqueurs communautaires et identitaires prédominants dans notre société. De nos jours, la cérémonie qui entoure el thara perd de son authenticité, et beaucoup de familles la perpétuent sous des traits d’opulentes fêtes.
Leila Assas
Bibliographie :
- La symbolique de la circoncision en Algérie, cas des berbères des Aurès Dr Chorfi Mohamed Séghir Maître de Conférences Département de psychologie – Université de Constantine. Texte publié par Géza Róheim – Patrick Fermi Association ©
- Histoire et géographie des circoncisions rituelles Gérard TILLES Société Française d’Histoire de la Dermatologie, Musée de l’Hôpital Saint-Louis, Paris, France . Progrès en Urologie (1999), 9, 1148-1157
- À l’origine des signes identitaires du judaïsme , Christophe Lemardelé; Chercheur associé de l’UMR 8167 – Orient et Méditerranée – Mondes sémitiques
- Salim EL HASSAR ,Expression musicale féminine à Tlemcen. Le groupe et le sacré.
- Image : – https://www.elishean.fr/wp content/uploads/2013/10/circoncision1.jpg