15 May
15May

Le Grand Touat, à l’instar de l’école de Fès au nord Afrique et de Timbouctou au Sahel, fut depuis des siècles, l’un des  pôles spirituels les plus prestigieux; où foisonnaient et se multipliaient autrefois rencontres des lettrés et érudits de  l’islam. D’ailleurs, l’âge d’or des ulémas connait un essors fulgurant aux XVIe siècle et XVII e siècle; périodes marquées par l’omniprésence des zaouïas, et du pouvoir chérifien (confréries religieuses) venues du Sultanat du Maroc . 


L’héritage du Grand Touat  

Le champ  littéraire et canonique ksourien  s’articule autours des Khizānas  (bibliothèques); plus particulièrement celles qui se trouvent à Tamentit, ancienne capitale du Grand Touat médiéval. Très vite, cinq grands noms de l’érudition ksourienne s’impose : les Bakrī-s de Tamantit, les Tinilānī-s de la region du Timmi, les Zajlāwī  gourarales Raqqādī et les Balbālī de  Mlouka. 

Ces  bibliothèques, de véritables trésors littéraires, regroupant des manuscrits, des textes de loi, des récits de voyages , ainsi que des biographies de savants aux origines ksourienne tel que ʿAbd al-Raḥmān b. Baʿamar al-Tinlānī (m. 1189/1775) mais aussi de lettrés d’autres contrés, citons  : Abd al-Raḥmān b. Ibrāhīm al-Jantūrī. 

Parmi ces précieux ouvrages, on trouve les nawazil, qui sont également répandues au Maghreb austal, au Sahel et en Espagne Andalouse. El nawazil, du singulier Nazila sont des recueils à portée canonique, ou supposée l’être. Elles disposent également d’une valeur jurisprudentielle, et incluent des échanges épistolaires et biographie d’illustres savants et caïds . Leur dénomination nazla/nawazil, signifie littéralement  « ceci est  tombé »; et fait donc directement référence à des  «consultations sur des cas concrets, sans précédent, et qui font jurisprudence »* . 

En réalité, nous ne sommes pas en présence de textes canoniques  applicables directement, mais de  pastiches; ce qui correspond plus à « une forme littéraire, […] que de  l’élaboration de cadres analytiques ». Par ailleurs, El nawazil, appelées également « ajwiba » -réponses- ,  se distinguent des Fatwas par leurs valeurs sémiologique non laconique

En outre, la valeur  didactique des nawazil  dans les affaires des communautés  a évolué,  souvent en parallèle de la législation  officielle. Et cela même durant la période coloniale, pendant laquelle les caïds étaient en charge juridique, des affaires économiques de la région, us et coutumes ainsi que dans  les litiges et querelles ethniques . 

En l’an  1840 , le cadi Muḥammad al-Ḥājj b. ʿAbd al-Raḥmān al-Balbālī (m. 1244/1828), initie le projet  de  l’anthologie Nawāzil al-Balbālī, regroupant ainsi l’oeuvre de trois générations de lettrés. Le projet fut achevé   par son fils . Cette démarche est fréquente, et souvent entreprise par des disciples  ou descendants  soucieux  de porter les dires d’un savant à la postérité . Il convient de préciser que l’ anachronisme, le manque de précisions, voire même la subjectivité  des  nawazil remettent en cause leurs valeurs  religieuses. Cependant, ces textes comportent de véritables prouesses stylistiques, et  demeurent d’une grande portée historique.

 Leila Assas   

Citation Ismail Warscheid * 


  • Bibliographie :   
  • Ahmed Aba-Safi Jaafari –  Etudes du el Touat – consolidés de  communications – 2005 – 2008 
  • Ismail Warscheid  , Entre mémoire lettrée et vécu institutionnel : La compilation de nawāzil dans le grand Touat (Algérie) aux XVIIIe et XIXe siècles . EHESS  
  •  DABBĀGH, Muḥammad, SNĪNĪ, Muḥammad, ṬAWĀBA, Nūr al-Dīn, AL-ZAYN, 
  • Mīlwa, BIN ḤAMMŪ, Muḥammad, Ghunyat al-muqtaṣid al-sāʾil fīmā waqaʿa fī 
  • Tuwāt min al-qaḍāyā wal-masāʾil, Adrar, Universite d’Adrar Departement des 
  • Sciences Sociales et Religieuses  
  • Al -Karīm al-Balbālī, Ghāyat al-amānī fī ajwibat Abī Zayd al-Tinilānī, ms. prive, fonds 
  • khizāna al-Balbālī, Kousam, Wilaya d’Adrar, f. 31. 
  • https://archive.org/details/FatawaAl-nawazil  



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