La région de la Saoura, limitrophe du Maroc et à cheval entre les Hauts plateaux et les contrés sahariennes de l’ouest de l’Algérie possède, de ce fait, un riche patrimoine musical; où la danse tient une place de choix, au sein de la collectivité. Toujours en communion et dans la mixité (en fonction des circonstances), les danses des femmes de la Saoura relatent une dialectique intrinsèque au mode de vie local. Spécifiques à des tribus ou pratiqués par l’ensemble de la population saouri, elles nous offrent un spectacle rythmé et saccadé, citons parmi les plus connues, la danse haydus, mâyâ et hubi.
La dialectique d’une danse
L’étude des danses doit susciter un intérêt qui transcende le caractère festif de cette dernière. L’ethnologie s’est attelée à mettre en exergue « [ ] la danse en tant qu'activité constructrice de sens » comme le souligne Aude Thuries et prône « un retour aux interrogations premières quant à la nature de la danse, et à la définition que l’on peut en donner. » De ce fait, les danses traditionnelles des femmes de la Saoura nous renseignent sur une dialectique et un mode de vie basé sur le partage et la vie collective. Elles possèdent des traits convergents à savoir, le caractère collectif, et la polyphonie qui s’accompagne de percussions. « La Saoura où les chants mystiques se mêlent aux profanes et offrent un assortiment de répertoires musicaux et de danses aux thèmes variés » explique Mohamed Tehrichi.
La danse haydus des amazigh Ch’leuh (riverains marocains et algériens) au nord se joue en deux rangs. Épaules serrées; les danseurs rythment la danse en tapant des mains et des pieds de manière synchronisée. La tribu Ghnanma possède une danse similaire au nom d’el mâyâ. A la fois, une manifestation mystique et profane, de par l’invocation religieuse jumelée au fait amoureux, qui se retrouvent souvent confondus.Elle est accompagnée du bendir, et se pratique parfois dans la mixité.
La danse hubi des Dwimnî est très prisée lors des mariages. Son étymologie découlerai de l’arabe classique « h'aba » qui signifie « il s’est approché ». Elle s’exécute en hémi cercle, avec une meneuse au centre. Lorsqu’ elle est mixte, elle prend les allures d’une parade amoureuse, l’occasion de former les futurs couples.
La région de Tablbala est connue pour deux danses ; la première, Ti kedda « petit pied » où le rythme est obtenu en tapant des pieds, lui faisant gagner en intensité de façon progressive. La seconde, Allah yâanina, pratiquée lors de la cérémonie du henné, le troisième jour du mariage; elle s’exécute en procession suivant un cheminement ancestral, depuis l’ancienne mosquée à la demeure de la marié. Allah yâanina, Allah yâanikun» signifie Ö Dieu, protège-nous.
Le riche patrimoine musical et de danse saouri a vécu ses derniers temps un renouveau grâce à Souad Asla et sa «Lemma becharia », un projet artistique visant à rehausser la culture musicale et chorégraphique de la région. Les danses de la Saoura sont un patrimoine à préserver et à étudier.
Leila Assas
Bibliographie :